Et aujourd’hui le 24 août 2009

Ne jamais dire jamais…
Mon p’tit cœur.
Quatre années et six mois que tu es parti…
24 février 2005 – 24 août 2009.
Au fil du temps, j’avais gardé de la rancune pour ceux et celles qui nous ont lâché, ou blessé dans leur paroles.

Ne jamais pardonner était ma devise.

Pourtant….
Depuis quelques mois, tout doucement, j’ai refais un pas vers certaines personnes, me rendant compte qu’en final, elles me manquaient. Je dis « certaines » car il me reste de la rancœur envers des amis. Tu en sais les raisons, ma puce. Il y a des choses que je ne peux effacer, même si un jour nos chemins se recroisent. Je pardonne, à ceux et celles qui se sont éloignés, ayant eu peur d’être maladroit et le temps passant, ne sachant comment revenir.

Je pardonne pour des mots qui nous ont fait mal, alors que ce n’était pas le but. Je pense à cette personne, très proche, que j’aime beaucoup et qui m’avait dit qu’il fallait que j’apprenne à garder ça pour moi. Je la remercie aujourd’hui, de s’être rendu compte de sa maladresse, d’avoir eu le courage de m’en reparler et de s’excuser.  En faite elle croyait bien faire car c’était suite à une émission à la télé ou un psy avait parlé justement sur  la perte d’un enfant, disant qu’avec le temps il fallait aider les parents en évitant de parler de  leur enfant décédé. Quel abruti ce psy ! C’est exactement le contraire ! C’est incroyable jusqu’où peut aller la connerie humaine ! Ces gens non concernés qui se permettent de donner des conseils sur un sujet aussi délicat. Si ce psy avait vécu ce que nous, tous les parents désenfantés vivons, il aurait eu un tout autre dialogue !

Je suis contente de toutes ces retrouvailles. Que nous nous soyons expliqués et compris, m’a fait prendre conscience combien il peut être difficile de faire face à des parents ayant perdu leur enfant.

Mon papa était proche des gens. Il avait la parole facile. Je tiens ça de lui ! J’ai toujours été là pour les autres moi aussi. Certains ont « oublié ».

D’avoir renoué le dialogue et de voir les yeux se mouiller lorsque je parle de toi mon ange, je sais maintenant que non, tu n’es pas oublié.

Seulement on ne le montre plus. Rares sont les personnes aujourd’hui qui viennent te fleurir, ma puce, ne serait-ce qu’au 1er novembre où à ta date de DC.

Nous faire savoir que l’on pense à nous,  même si c’est le cas, nous le dire, ne serait-ce que par courrier, mail, texto, si c’est difficile verbalement. C’est du baume pour notre moral, encore plus au moment des dates où l’on se sent terriblement seuls…

Aujourd’hui, j’ai comme une double vie.

J’ai besoin de mes amis, de certains proches de la famille, mais aussi de mes nouveaux amis de cœur.
Ceux qui vivent le même cauchemar que nous.
Ceux avec lesquels nous nous comprenons si bien et pouvons parler de nos enfants chéris sans tabou.
Nous correspondons par mails, par téléphone. Se dire quand on va mal. Tout se dire…
Nous pouvons alors » enlever nos masques » ne plus faire semblant, être nous…
Car faire semblant est notre quotidien. Nous n’avons pas le choix pour garder notre place dans cette société, pour ne pas être rejeté, mis à l’écart. Nous avons compris que nous ne pouvons être continuellement tristes. Cela gêne. Dérange. Les gens ne comprennent pas que les années passant, nous ne redeviendrons jamais comme avant, que cette douleur, est là, dans notre tête, dans nos tripes et qu’on y peut rien.
Avec Anita et Michel, Maud et Francis, nous nous sommes connus « après ». Nous avons là, de véritables amis. Nous avons la chance de ne pas habiter trop loin les uns des autres, ce qui nous permet de nous rencontrer régulièrement, de nous apprécier de plus en plus.

Quoi que l’on en dise,il y a toujours des langues de vipère pour nous dire que ces rencontres ne sont pas saines et ne nous permettrons pas d’avancer !!??
A ces gens là je dis :
« Mêlez-vous de ce qui vous regarde !
Comment pouvez-vous savoir ce qui est bien ou mal pour nous ?
Qui êtes-vous pour encore nous juger ? »
Il est évident que nous parlons beaucoup de nos fils ! Les souvenirs «  d’avant » où nous avions alors le bonheur de pouvoir les embrasser et de  « maintenant », de notre vie sans eux !
Nous parlons de leur accident, ce que nous avons vécu ce terrible jour, cela nous permet « d’exorciser ». Pour nous c’est même vital.  Garder cette souffrance pour nous seul, c’est comme cela que se déclenchent  les maladies. C’est prouvé.
Fabien était le fils unique de Maud et Francis. C’est terrible…
Anita et Michel ont une fille du même âge que notre Jérémy. Tous les deux sont si malheureux sans leur frère.Nous cherchons comment les aider. Toutes les situations sont difficiles…

Mais ne croyez pas que nous n’avons pas d’autres sujets de conversation ! Nous parlons de tout, de rien, nous rions, nous plaisantons ! Lorsque l’on se reçoit, nous prenons plaisir à faire de bons petits plats. D’être ensemble est une thérapie.
Nous sommes des parents perdus, qui avons besoin de réconfort. Et ça on sait se le donner entre nous, parce qu’on vit le même cauchemar…
Nous nous faisons de petits cadeaux d’amitié. Nous offrons des fleurs, des anges, des bougies  à nos p’tits cœurs.
Je corresponds aussi très régulièrement  avec Sonia, Sylvie, Françoise, et suis en relation de temps en temps avec d’autres mamans.

Le temps passe….comme ça….
La  mémoire m’a fait défaut. J’ai « zappé » beaucoup de choses de ces quatre années…
Ce qui reste très précis, ce que je ne pourrais jamais oublier, sont ces journées du 24 février au 2 mars 2005.
Tout est là.
Le moindre détail.
Dans les moments où je ne suis pas trop occupé. La nuit alors que je ne dors pas, d’un seul coup, tu m’apparais, mon Alexandre, mon trésor, mon bébé. Tu es là allongé sur cette table au funérarium. Ton visage si beau, tes yeux si bleus fermés pour toujours…
C’était la première fois que je te revoyais après ton accident. Alors d’autres images toutes aussi douloureuses suivent. C’est l’enfer. C’est ingérable. Je ne peux penser à autre chose. C’est impossible. Le cerveau ne sait pas faire ça. C’est terrible.
Je n’y crois toujours pas.
Ce n’est toujours pas possible….
Je sais bien que pour toujours les dates, les fêtes resteront une torture.
Les retours en arrière, se sera pour toujours.
Parce que tu me manques, Alexandre.  Il m’est impossible d’accepter que tu sois parti.

                                                        JAMAIS !

Je sais qu’à chaque instant je peux re-sombrer. Je marche sur un fil en permanence, le vide de chaque côté.  Pourtant je ne prends plus de traitements depuis 15 mois.  Trop d’effets secondaires.  Il faut que je reste lucide dans mon boulot, je ne tiens pas à le perdre, il m’aide à  rester en surface.
Et puis cela n’enlève pas ma douleur de me gaver de pilules. Mais ça, c’est mon avis personnel.  Chaque maman, chaque papa est différent.  Chacun fait comme il veut, mais surtout comme il peut.
C’est comme ça pour moi aujourd’hui, ça sera peut-être autrement demain.

                                                           Je n’sais pas.

Car il faut lutter. Toujours et encore. Sans répit.
Françoise la maman de Sylvain, a écrit dans le site de son fils http://francoiseollivier.e-monsite.com
« il y a des jours… »
Elle exprime terriblement bien notre ressenti 

                                      Voilà ma vie aujourd’hui, quatre années et demie après…

C’est désormais notre vie, à nous les mamans, les papas, nous qui subissons la pire des épreuves.
Parce que nous ne pourrons plus jamais aller « bien ». Parce que ce n’est pas dans l’ordre des choses. Parce qu’un enfant ne doit pas mourir avant ses parents.

Mon Alexandre chéri, je t’aime, je t’aime, je t’aime…..

J’ai arrêté de te demander de nous aider, d’aider ton frère qui avance péniblement. Tu ne peux rien pour nous sur cette maudite terre. Je ne veux pas te torturer en te demandant quelque chose où tu n’as pas le pouvoir…

On ne guérira jamais du manque de toi…

Je t’envoie des milliers de bisous dans ton paradis que j’espère bien blanc…

A bientôt mon Ange…

Ta p’tite maman.